Des chips collées au palais


Antoine nous fait l'amitié d'un billet invité sur Metallurgeek.
Enjoy !



Aujourd'hui, je suis allé dans un bar écouter un concert. Deux guitaristes. Je connaissais l'un des deux, et je retrouvais plusieurs personnes de ma connaissance à l'occasion. Une bonne soirée en perspective, dirons-nous.

Mais horreur ! Bien qu'ayant pris soin de prendre un vêtement de pluie par temps de pluie, présence d'esprit inhabituelle chez moi, chose étrange tout autant qu'inattendue, j'ai cependant oublié de prendre quoi que ce soit pour noter des idées.

Des idées, tout le monde en a tout le temps, bien sûr. Ce qui différencie les gens du commun des scénaristes, ou disons, de manière plus générale, des créateurs, c'est sans doute que ces derniers savent d'une part noter toutes leurs idées plutôt que de les laisser filer, et d'autre part ne garder que les bonnes une fois la relecture venue.

Toujours est-il que me voilà dans un bar sans papier ni crayon, avec des gens sans papier ni crayon. Je sais que j'ai tendance à oublier toutes mes idées, les bonnes comme les mauvaises, et là, cerise sur le chapeau... j'allais boire de l'alcool ! Le pompon ! Malédiction ! Que faire, que faire ?

"Ton mobile !" me direz-vous. Oui, je pourrais transformer en bloc-note mon téléphone qui sert à téléphoner. Je pourrais créer un brouillon de SMS pour ne pas l'envoyer, juste pour garder ce qui me passe par la tête. Je suppose que ce n'est pas ma manière de faire, et j'ai choisi, à la place, le palais mental. En français, on dit la méthode des lieux.

Oui, vous savez, le moyen mnémotechneek. Celui de Patrick Jane dans The Mentalist. Celui de Sherlock dans Sherlock. Celui où on voit ce dernier se prendre la tête dans les mains et explorer de manière exagérément dramateek son palais imaginaire où sont entreposés tous ses secrets.
C'est donc ce que j'ai fait. À défaut de palais, j'ai choisi la maison de mon enfance.

Ainsi, en écoutant cette museek country pour laquelle j'étais venu, en regardant défiler le diaporama thémateek projeté sur un mur du bar, j'ai vu une image de pont couvert. Ce pont m'a donné une idée d'écriture à intégrer dans un roman. On pourrait imaginer un immense pont couvert qui traverse un fleuve. Ce pont serait large et pourrait abriter un marché, surtout les jours de pluie. Ce pont serait peut-être iconeek de ce village. Ce pont a donc trouvé place dans le petit escalier qui mène à la porte de mon ancienne maison.

En prenant l'apéro entre amis, il y a eu plusieurs tournées... pas d'alcool, non non, des tournées de chips. Avez-vous déjà observé la façon dont les biscuits apéritifs et autres amuse-bouches diminuent au fil du temps ? Considérons le schéma scientifeek précis ci-dessous. (Avec de jolis A pour faire les flèches.)



Observons tout d'abord la courbe rouge qui nous indeek qu'il y a de moins en moins de chips au cours du temps, ce qui est déplorable. Voyons ensuite la bleue qui nous montre que cette disparition effrénée se fait en plusieurs phases, qu'on peut légender en entrant dans l'esprit de n'importe quelle personne présente :

1 : AAAAAAAAAAAAAAAH DES CHIPS !!!
2 : Oula, calmons-nous, sinon mes tendances morfales vont être dévoilées au grand jour, diantre.
3 : Je crois que les autres en ont eu un peu plus que moi...
4 : Ben zut alors, ça disparaît vite ces bêtises ! Y'a plus que les petites cassées, elles sont moins bonnes, forcément.
5 : Je ne vais quand même pas manger la dernière chips, cela engendrerait chez moi un sentiment de culpabilité bien trop puissant, m'exposerait aux moqueries de mes camarades et m'obligerait à aller en chercher d'autres.
6 : ?

Heureusement, d'une manière ou d'une autre davantage de chips arrivent et le même cycle reprend, encore et encore. Un bol de chips a donc pris place dans la petite allée qui mène au jardin de mon enfance.

Vient un moment où le chanteur prend son harmonica et nous enchante de ses harmonies harmonieuses. Et me voilà de me dire, en bon instrumentiste, il m'en faut un. Probablement un harmonica en sol. Peu importe, il m'en faut un. À Noël peut-être ? Il faut mettre ça sur une liste de souhaits. À côté du tin whistle. (Puisque le ukélélé, c'est bon, c'est déjà fait.) Voilà donc un harmonica géant qui prend place dans la cuisine aux rideaux en crochet qui a hebergé les repas de mon enfance. Il a du mal à tenir dedans, et je ne vois pas comment on pourrait l'en sortir. À croire qu'on l'a construit à l'intérieur.


Mon bilan de cette soirée est que ces images vives fonctionnent. Vous allez me dire, retenir trois choses, c'est facile, pas besoin de ton palais chelou qu'est même pas un palais en fait. Ouais, mais d'une, j'ai pas une bonne mémoire, de deux, j'ai tellement d'idées qui fusent que c'est un certain bonheur mental que de savoir que celles qui m'importent sont sauvegardées en sécurité, et de trois, j'avais un peu bu, quand même.

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